Le fado évoque irrésistiblement un chant mélancolique, teinté de nostalgie. On sait moins que ce blues portugais avait aussi sa propre danse, le Fado Batido, inspirée d’une danse à claquettes énergique et virtuose. Elle a mystérieusement disparu à l’aube du XX^e siècle, probablement censurée par l’Église catholique et le régime fasciste en raison de son caractère érotique et provocateur. Les chorégraphes et performeurs Jonas&Lander se sont attachés à raviver ce patrimoine tombé dans les oubliettes dans un spectacle hybride, entre danse et concert, conçu pour quatre danseurs, quatre musiciens et un chanteur de fado (Jonas lui-même). Leur Bate fado nous transporte à Lisbonne au cœur du XIX^e siècle où resurgit toute l’énergie sensuelle du fado dansé. Avec humour et impétuosité, les neuf interprètes scandent une multitude de cadences en martelant le sol sans jamais s’interrompre. 

Dans un feu condensé, nourri d’un dialogue entre le rythme des claquettes et des guitares, les artistes ne s’interdisent ni la parodie ni l’impudeur, déconstruisant l’image du fadista mâle et libérant les corps qu’ils chargent d’une électricité nouvelle. La voix profonde de Jonas ajoute à l’intensité d’un spectacle qui remet au plateau la puissance subversive du Fado Batido dans un élan innovant.